Jamais trois heures de théâtre ne seront passées aussi vite.
De la mini série de Rainer Werner Fassbinder en cinq épisodes, diffusée en 1972, Julie Deliquet en extrait un moment de vie où tout semble se jouer là , maintenant, sur le plateau.
Les acteurs mangent, se douchent, se recoiffent, s'invectivent. Ils vivent et on en oublie qu'ils jouent.
Julie Deliquet fait naître dans chaque détail, chaque dialogue, cette double sensation de la finesse et du mordant.
Huit heures ne font pas un jour déconstruit les préjugés de la classe moyenne envers la classe ouvrière et décortique le monde du travail ouvrier.
L'usine devient le lieu de la catharsis où tout se joue, tout se passe. Elle est le cœur de la pièce, le cœur de la vie des ouvriers.
L’espace scénique se repartit entre le bureau du contremaître, la cuisine, les douches, l'espace de travail, la chambre de repos, les toilettes et les vestiaires.
Chacun évolue d'une pièce à l'autre et notre regard se perd dans cette vie qui foisonne sous nos yeux.
Le texte tourne autour de la question de l'organisation du travail, de l'amour et du bonheur. Tout est liè.
Ici les femmes ne sont ni hystériques, ni mariées, ni enceintes, elles se veulent libres et entreprenantes.
Le champ lexical de l'usine, le comité d'entreprise, le profit, se mêle aux mots de la vie, au besoin, à l'envie.
D'un esprit positif, les ouvriers vivent le monde de l'usine en essayant toujours de le déconstruire et d'envisager le travail autrement. Ils luttent sans violence, avec tous leurs espoirs et en tenant compte des aspérités de chacun.
Julie Deliquet et sa troupe de comédiens nous offrent un moment jubilatoire où le théâtre et la vie ne font plus qu'un. L’Å“uvre engagée et militante est une véritable épopée solidaire et familiale, interprétée avec une énergie et un humour communicatifs et un souffle optimiste.
Huit heures ne font pas un jour de Rainer Werner Fassbinder Épisodes 1 À 5, mise en scène par Julie Deliquet au Théâtre Gérard Philippe, centre dramatique national de Saint-Denis, jusqu'au 9 octobre 2022
Traduction : Laurent Muhleisen
Avec : Lina Alsayed, Julie André, Éric Charon, Évelyne
Didi, Christian Drillaud, Olivier Faliez, Ambre Febvre, Zakariya Gouram,
Brahim Koutari, Agnès Ramy, David Seigneur, Mikaël Treguer, Hélène
Viviès et en alternance : Léa Aouchiche, Keyah Ido, Sabrine Malou Mebarki
Collaboration artistique : Pascale Fournier, Richard Sandra
Version scénique : Julie André, Julie Deliquet, Florence Seyvos
Scénographie : Julie Deliquet, Zoé Pautet
Lumière : Vyara Stefanova
Son : Pierre de Cintaz
Costumes : Julie Scobeltzine
Régie générale : Léo Rossi-Roth
Le décor a été réalisé dans les ateliers du théâtre Gérard Philippe, centre dramatique national de Saint-Denis sous la direction de
François Sallé.
Sophie Trommelen, vu au TGP le 3 octobre 2021