Le texte, La Mort de Danton, de Georg Büchner entre au répertoire de la Comédie-Française, mis en scène par Simon Delétang, et porté par Loïc Corbery et Clément Hervieu-Leger qui incarnent les deux figures historiques de Danton et de Robespierre.
Les comédiens évoluent dans les magnifiques costumes d'époque de Marie-Frédérique Fillion, et nous plongent dans la période trouble et cruciale de la Terreur.
Simon Delétang met en scène deux visions d'un combat qui alors s'affrontent, deux idéaux pour une même cause.
Libertin et débauché est l'image de Danton que donne à voir la première scène, sa désinvolture et son enthousiasme contrastent alors avec la froideur et la rigueur de Robespierre, incarnation de la vertu.
Faux combat du vice contre la vertu, la fracture entre les deux hommes est ici plus profonde. L’humanité de Danton s'oppose à la violence de Robespierre. Au-delà de l'Histoire c'est le combat de deux hommes, d'un modéré et d'un radical, qui ne peuvent pas se comprendre.
Ombrageux, le caractère de Robespierre incarné par Clément Hervieu-Leger, quelque peu emprisonné dans la rigidité du personnage, contraste avec celui plus vivant et spontané de Danton, porté par un Loïc Corbery magistral, qui de bout en bout exalte le talent oratoire et la verve de son personnage.
Choisir des comédiens jeunes, portant la fougue de leurs combats est véritablement une force de la mise en scène de Simon Delétang et permet de trancher avec le classicisme inhérent au texte.
Tout aussi judicieux est le fait de choisir Marina Hands qui porte le monologue de Marion avec fraicheur et intensité et vient contrebalancer le discours politique en apportant une parole féminine touchante et émouvante.
La scénographie fait évoluer les comédiens dans un intérieur depuis lequel résonnent les vibrations contestataires qui surgissent du dehors. Malgré le tumulte de la rue, tout se joue lors du procès de Danton, accusé de conspiration, qu'achève l'intervention de Saint-Just, incarné avec tout son talent par Guillaume Gallienne qu'on a véritablement plaisir à retrouver sur la scène de la salle Richelieu.
Simon Délétang nous donne à entendre les comédiens de la Comédie-Française entonner la Marseillaise et on ne peut pas nier que cela produit son effet.
Arrêté comme ennemi de la République, Danton ainsi que Camille Desmoulins, fougueux et rêveur Gaël Kamilindi, montent alors sur l’échafaud, scène finale qui signe la victoire de la tyrannie et du despotisme.
Simon Delétang met en scène un texte ancré dans une période complexe de notre l'histoire en exaltant le romantisme de ces caractères emplis d’idéaux et victimes d'une dictature aveugle et impitoyable.
La Mort de Danton de Georg Büchner, mise en scène de Simon Delétang jusqu'au 4 juin 2023 à la Comédie-Française
Traduction : Jean-Louis Besson et Jean Jourdheuil
et scénographie : Simon Delétang
Costumes : Marie-Frédérique Fillion
Lumières : Mathilde Chamoux
Musiques originales et son : Nicolas Lespagnol-Rizzi
Assistanat à la scénographie : Aliénor Durand
Avec :
Guillaume Gallienne
Saint-Just, membre du Comité de salut public (en alternance)
Christian Gonon
Barrère, membre du Comité de salut public et Legendre, député
Julie Sicard
Julie, femme de Danton
Loïc Corbery
Georges Danton, député
Nicolas Lormeau
Lacroix, député
Clément Hervieu-Léger
Robespierre, membre du Comité de salut public
Anna Cervinka
Lucile, femme de Camille Desmoulins
Julien Frison
Saint-Just, membre du Comité de salut public (en alternance)
Gaël Kamilindi
Camille Desmoulins, député
Jean Chevalier
Collot d’Herbois, membre du Comité de salut public
Hérault-Séchelles, député
Marina Hands
Marion, une grisette
Nicolas Chupin
Billaud Varennes, membre du Comité de salut public et Philippeau, député
Sanda Bourenane
une femme
Vincent Breton
un monsieur, deuxième citoyen, un lyonnais, un député et un bourreau
Olivier Debbasch
un monsieur, premier citoyen, un député et Herrmann, président du Tribunal révolutionnaire et un géôlier
Yasmine Haller
une dame et Rosalie, une grisette
Ipek Kinay
une dame, Adélaïde, une grisette et une femme
Alexandre Manbon
un jeune homme, un député, Paris, ami de Danton et un prisonnier
Avec le soutien de la Fondation pour la Comédie-Française
Sophie Trommeln, vu le 18 janvier 2023