La rentrée du Théâtre du Palais-Royal s'affiche divine en présentant la dernière création de Géraldine Martineau, L’Extraordinaire Destinée de Sarah Bernhardt.
À l'écriture et à la mise en scène, Géraldine Martineau déroule en tableaux successifs la biographie de la vie d'une femme qui a décidé de son destin. Toujours à l'affut de la femme derrière le mythe, Géraldine Martineau se détache de l'image publique de l'artiste universellement vénérée pour approcher au plus près l'intimité de Sarah Bernhardt.
Dès son plus jeune âge, Sarah Bernhardt a su s'extirper des intentions libidineuses des hommes qui gravitaient dans la maison familiale. Sarah Bernhardt choisit le théâtre pour affirmer sa liberté et son indépendance et échapper ainsi au destin de demi-mondaine de sa mère et de ses sœurs.
Du monstre sacré que fut Sarah Bernhardt, Géraldine Martineau saisit le caractère affirmé, une intention qui révèle alors un portrait touchant et véritablement sensible de l'artiste iconique.
En la comédienne Estelle Meyer, Géraldine Martineau trouve l'incarnation parfaite pour exalter le sang bouillonnant de la femme avide de liberté. Estelle Meyer s’approprie la figure mythique de Sarah Bernhardt avec une fraicheur et une authenticité qui touche à l'évidence.
Estelle Meyer embrasse le physique et la voix singulière de l'artiste sans jamais chercher un vain copier-coller. L'incarnation de la comédienne séduit dans ce qu'elle a d'aussi personnelle qu'envoûtante. Délicate dans sa gestuelle, ardente dans ses intonations, Estelle Meyer figure le pouvoir d'attraction d'une féminité qui s'affranchit des diktats et creuse son sillon.
Comment raconter une telle destinée en 1 heure 45 ? Géraldine Martineau s'appuie alors sur la scénographie de Salma Bordes et les costumes de Cindy Lombardi qui, en sous-texte, viennent éclairer la personnalité de Sarah Bernhardt. Les projections du tableau de James Ensor ou du film de ses funérailles nationales, le cercueil de satin blanc ou l’alligator, viennent peupler la scène pour toujours figurer l'originalité de la femme extravagante, complexe et adulée de son vivant.
Loin de se reposer sur le seul motif de son personnage principal, Géraldine Martineau réussit à créer un véritable esprit de troupe. Sa mère, Marie-Christine Letort, les sœurs, Blanche Leleu et Priscilla Bescond, son fils, Sylvain Dieuaide, sa nourrice, Isabelle Gardien et les figures masculines d'Adrien Melin et d'Antoine Cholet entourent l'héroïne de leur présence indissociable de la vie intime de Sarah Bernardht.
Portée par l'énergie des comédiens, Géraldine Martineau déploie une théâtralité de chaque instant. Virevoltant entre les scènes classiques, musicales, émouvantes ou comiques, la représentation oscille entre les registres et évite l’écueil du biopic narratif extatique.
De la devise de Sarah Bernhardt ''Quand même'', de cet envers et contre tout, Géraldine Martineau déploie un magnifique portrait de femme, véritable figure de l'émancipation.
Énergique et fantaisiste, L’Extraordinaire Destinée de Sarah Bernhardt confronte l'imaginaire de la figure mythique à l'humanité de la femme déterminée et trouve le juste ton pour figurer la volonté impérieuse d'une femme qui s'empare de son droit à vivre sa propre vie, jusqu'à son dernier souffle.
Crédit Photos : © Fabienne Rappeneau
L’Extraordinaire Destinée de Sarah Bernhardt, une création de Géraldine Martineau jusqu'au 31 décembre 2024 au Théâtre du Palais Royal.
avec : Estelle MEYER,
Marie-Christine LETORT,
Isabelle GARDIEN,
Blanche LELEU,
Priscilla BESCOND,
Adrien MELIN,
Sylvain DIEUAIDE
, Antoine CHOLET,
Florence HENNEQUIN,
Bastien DOLLINGER,
Scénographie : Salma BORDES
Lumière et vidéo : Bertrand COUDERC
Costumes : Cindy LOMBARDI
Composition musicale : Simon DALMAIS
Chant : Estelle MEYER
Chorégraphie : Caroline MARCADE
Perruques et maquillages : Judith SCOTTO
Collaboration artisitque : Sylvain DIEUAIDE
Assistante : Elisabeth CALLEO
Son : Antoine REIBRE
Sophie Trommelen, vu le 30 août au Théâtre du Palais Royal