Rien ne me sépare de la merde qui m'entoure de Virginie Despentes

 


Du texte de Virginie Despentes, prononcé le 16 octobre 2020 au Centre Pompidou, Véronique Ros de la Grange crée un objet théâtral et musical à la fantaisie assurée. Au plateau, Véronique Ros de la Grange, Jacques Michel, Béatrice Graf et Furioza extraient toute l’énergie fédératrice et la musicalité du monologue écrit dans le contexte particulier du Covid pour la transformer en une matière énoncée, chantée et chorégraphiée.

Dans ce long poème vertigineux, écrit sous forme de manifeste, Virginie Despentes fustige le contrôle que le confinement et le couvre-feu ont insidieusement ancré dans nos comportements. Se protéger de l'autre, c'est perdre toute la puissance de la contamination de nos libertés, de nos échanges qui, par contagion, font l'essence même de notre humanité, être au monde, ensemble.

Nous avons avalé ces histoires de frontières, cette fable du chacun pour soi, chacun chez soi, cette fable qui veut que les choses telles qu’on les connaît soient la seule réalité possible et qu’elle soit immuable. La fable selon laquelle la race humaine n’aurait qu’un seul destin collectif possible : l’exploitation impitoyable des uns par une élite, le pouvoir par la force, et le malheur pour tous.

Sur la scène, les murs de tôles ondulées se parent d'affiches et de graffitis qui figurent l'esprit punk propre à l'univers fécond de l'autrice. Karim Baghriche à la scénographie, Françoise Chaumayrac au maquillage et Émilie Revel aux costumes, figurent la fantasmagorie de ces clowns punks qui hantent le plateau.
L'adaptation trouve sa propre musicalité quand la batterie et les sons électroniques fusent sur le plateau. Ensemble, le groupe crée l'émotion et imagine son propre rythme aux variations tonitruantes.
La collaboration pertinente avec Furioza, auteure, compositrice, performeuse et interprète, déploie toute la rage et l'énergie indissociable de l'intention de Virginie Despentes.
 
Véronique Ros de la Grange, Jacques Michel, Béatrice Graf et Furioza nous donnent à réentendre une parole essentielle, engagée, qui toujours se tourne du côté de notre humanité, de notre désir de communion envers et contre tous les diktats des élites.
Avec originalité et un ton véritablement personnel, Rien ne me sépare de la merde qui m’entoure exalte la voix de Virginie Despentes. La parole engagée prend vie et prolonge l'indispensable réactivation de nouveaux narratifs où la bienveillance subordonnerait à la performance, où l'aspiration des invisibilisés prévaudrait sur celle des institutions. 

 



Photos : Yoann Tivoli

 Rien ne me sépare de la merde qui m'entoure de  Virginie Despentes   jusqu'au 13 octobre 2024 au Lavoir Moderne Parisien.

D’après un texte écrit par Virginie Despentes
Mise en scène Véronique Ros de la Grange
Musique Furioza et Béatrice Graf
Avec Furioza, Béatrice Graf, Jacques Michel, Véronique Ros de la Grange
Scénographie Karim Baghriche
Lumière Yoann Tivoli
Maquillage-Coiffure Françoise Chaumayrac
Costumes Emilie Revel, Julie Delieutraz
Régie son Jean François Domingues
Régie lumière Chloé Roger
Attachée de presse Sandra Vollant
Production OÙ SOMMES-NOUS – HYBRIDES&COMPAGNIE avec le soutien de Pro Helvetia, Canton de Genève
 

Sophie Trommelen, vu le 2 octobre 2024 au Lavoir Moderne Parisien