Arts Mouvants

Tout au long de ce printemps 2025, le Théâtre de la Colline met à l’honneur le Moyen-Orient. La création du cinéaste et metteur en scène israélien Amos Gitaï, Golem, côtoie T’embrasser sur le miel, première pièce de Khalil Cherti, et précède la dernière création de Wajdi Mouawad, Journée de noces chez les Cromagnons . Autant de représentations qui, en écho aux bouleversements tragiques de notre époque, essaient de créer un espace de résistance face à la violence des conflits qui sévissent en Israël, en Syrie, au Liban. Depuis l’intimité de leurs appartements respectifs, Siwam et Emad communiquent par vidéo, s’envoyant de petits films faits maison où, avec une inventivité salvatrice, ils rejouent et détournent le tragique de leur quotidien en temps de guerre. En imaginant ces saynètes, ils s’inventent une proximité possible, un refuge face au chaos. Grâce à un dispositif bi-frontal ingénieux, Khalil Cherti scinde le plateau en deux espaces distincts, recréant les conditi...

Dolorosa de Rebekka Kricheldorf mise en scène de Marcial Di Fonzo Bo

Le directeur du Quai d’Angers, Marcial Di Fonzo Bo, s’empare avec une fluidité réjouissante de la variation contemporaine des Trois Sœurs de Tchekhov, signée Rebekka Kricheldorf. Pensée à la fois comme une adaptation et une réponse à l’effondrement du monde d’hier, Dolorosa , inscrit son écho dans la temporalité même des espérances tchékhoviennes. Car si, en 1900, l’auteur russe plaçait sa foi dans un avenir progressiste, la version de Rebekka Kricheldorf confronte ses héroïnes à un présent sans perspective, vidé de cet espoir qui nourrissait encore le rêve d’un ailleurs. Marie-Sophie Ferdane, Elsa Guedj et Juliet Doucet incarnent Olga, Micha et Irina, trois sœurs qui, comme leurs modèles d’hier, rejouent la vacuité de leur existence. Mais là où celles de Tchekhov regardaient Moscou comme un horizon des possibles, les trois sœurs de Dolorosa naviguent dans un monde désenchanté, où les illusions se sont dissipées sous le poids d’une lucidité sans appel. Le langage, plus tra...

Black Label de David Bobée et JoeyStarr

De la première déclaration des droits humains en 1222 – la Charte de Manden, reconnue par l’UNESCO comme patrimoine culturel immatériel – à Iench d’Eva Doumbia, David Bobée et JoeyStarr réunissent un kaléidoscope de textes antiracistes et composent un spectacle qui prend la forme d’une lecture musicale chorégraphiée. Des textes fondateurs de la négritude d’Aimé Césaire, du militantisme de Malcolm X, aux témoignages des tirailleurs sénégalais, les textes se déploient comme autant de réponses aux justifications colonialistes et racistes qui trouvent leur résurgence dans l'impunité des violences policières. Évitant l’écueil d'un folklore inutile, la scénographie de David Bobée et Léa Jezequel a cette élégance de l'épure. De sa voix rocailleuse, JoeyStarr, en poète cracheur du feu de la pensée des diasporas africaines, fait résonner avec justesse les mots abrupts de lucidité. L’artiste signe lui-même un texte, empreint de cette verve qui a inscrit le rap français dans une o...

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