Après L’Île aux pères, où elle interrogeait le poids de la figure paternelle, la metteuse en scène et comédienne Liza Machover poursuit son exploration de l'affirmation de nos individualités. A travers Lopakhine danse elle s'attache à une autre forme d’émancipation : celle que provoque l’art, en amenant l’individu à s’affranchir de son milieu social. Après Laval, Carro, Saint-Denis, Vire ou Granville, ce soir, Lopakhine danse à Paris.
Liza Machover signe un solo composé sur mesure pour et avec le comédien danseur Julien Moreau. En mettant en parallèle son propre choc esthétique à la vue de Lopakhine tournant comme un derviche dans la Cérisaie et celui de Julien Moreau qui découvre la breakdance un soir devant sa télé, Liza Machover questionne autant l'épanouissement personnel de l'artiste que les doutes et l’exigence que la vocation induit.
En une adresse directe, Julien Moreau déploie son parcours intime. Aux archives sonores et filmées de ses premières battles de breakdance, aux souvenirs des premières reconnaissances publiques, fussent-elles dans le salon de soirées adolescentes, se mêle l'espoir de devenir un grand acteur reconnu et bankable. De ce désir d’accomplissement personnel adoubé par la reconnaissance sociale surgit peu à peu la figure de Lopakhine. Fils de moujik devenu propriétaire de la maison de ses anciens maîtres, le personnage de Tchekhov devient ici le double fantasmé de l’artiste. Lopakhine danse se fait l'écho des doutes qui jalonnent le parcours de l'artiste qui s'affranchit de sa condition sans pour autant s’affirmer dans une place socialement confortable.
Des multiples propos entremêlés – le choc culturel, la condition sociale, la tension entre désir d’émancipation et légitimité – Julien Moreau déploie un fil sensible. Utilisant son propre corps, qu'il figure en objet marionnettique, il noue le dialogue entre ces questionnements qui toujours convergent vers la nécessité vitale de l’expression artistique, qui à elle seule justifie tous les fantasmes. Convoquant au plateau la parole de spectateurs, Liza Machover conforte l'idée que oui, l'art provoque des rencontres essentielles.
photos : © Adèle Le Menelec-Robert
Lopakhine danse à Paris jusqu’au 13 avril 2025 à l'Athénée Théâtre Louis-Jouvet
Ce spectacle s’inscrit dans la Saison Prémisses dédiée à la Jeune Création en Salle Christian-Bérard.
Production : Superfamilles
Co-productions : Le Préau, CDN de Normandie Vire ; L’Archipel, Granville ; L'Espace Marcel Carné, Saint-Michel Sur Orge Soutiens : DRAC Normandie ; Région Normandie ; Département du Calvados ; Ville de Caen ; Le Préau CDN de Normandie Vire ; L’Archipel Granville ; Le Studio 24, Caen ; Le Reflet Saint Berthevin ; Le Théâtre Gérard Philippe, CDN de Saint Denis ; La Coopérative chorégraphique, Caen ; Le 104, Paris ; Le Point Éphémère, Paris, Le Château de Monthelon ; La Loge, Paris.
Avec l'aide à la diffusion de la Ville de Paris et de l'ODIA Normandie.
Le Cercle de l’Athénée et des Bouffes du Nord et sa Fondation abritée à l’Académie des beaux-arts soutiennent la saison Prémisses 24-25 dédiée à la Jeune Création en salle Christian-Bérard.
Sophie Trommelen, vu le 4 avril 2025 à l'Athénée Théâtre Louis-Jouvet